J’ai eu ce week end une de mes
meilleurs amies au téléphone. De celles que je connais depuis plus de dix ans,
de celles que j’ai connues bien avant d’avoir des enfants, et de celles qui ont
une pile de dossiers inavouables sur la jeune femme que j’étais à l’époque.
Elle a un parcours plutôt atypique.
Elle voyage 80% de l’année, part souvent en missions humanitaires et se lance
dans des projets qui peuvent paraître complètement fous. Je la vois donc assez
peu ces derniers temps et elle me manque.
Nous avons eu une jeunesse assez
similaire, mais notre vie d’adulte est radicalement différente.
Je suis celle qui est en CDI
depuis 8 ans, et toujours dans la même boite, celle qui est avec le même homme
depuis 10 ans, celle qui a fait 2 enfants, celle qui a acheté une maison, celle
qui a un lave vaisselle, bref, je suis un peu la « tradi » de notre
binôme.
Quand elle est en France, elle va
de CDD en CDD, elle a quitté son homme au bout de 6 ans de vie commune, sur un
coup de tête et enchaîne les relations plus ou moins stables (surtout moins d’ailleurs,
je ferai un jour un billet sur les nanas qui sont de véritables aimants à
connards), n’a pas froid aux yeux, peut partir au bout du monde du jour au
lendemain parce qu’une asso lui propose une mission au fin fond du Sénégal. C’est
donc l’aventurière par excellence.
Sa vie me faisait un peu rêver,
sans que pour autant je ne sois déçue, ou blasée de la mienne.
Quand j’ai eu son appel, ca m’a
fait un bien fou. Entendre sa voix (parce que les conversations via FaceBook, c’est
quand même pas tout à fait pareil).
Et là, elle me raconte. La
difficulté de la dernière année, dans un pays étranger, dont elle a du
apprendre la langue et les coutumes en très peu de temps. La difficulté d’elle
a eu à vivre dans un pays où les femmes ne sont considérées que comme une
sous-catégorie. La relation avec ce type malsain qui l’a littéralement brisée,
physiquement et moralement. Elle m’a raconté la violence des mots, la violence
des coups. Elle qui habituellement se drape dans ses principes d’égalité, entre
les hommes et les femmes, entre les Hommes tout court, est ressortie
complètement démolie. Après ce retour en France, elle avait pour projet de
repartir là-bas, pour finir ce qu’elle avait commencé. Elle en est incapable,
et j’ai tout fait, je fais tout, pour la retenir, pour ne pas qu’elle retourne
dans cette galère. Je lui ai dit que ce n’était pas un échec, mais une
expérience dont elle se souviendra toute sa vie.
Autant dire que quand elle m’a
dit : « Rends toi compte, j’ai 33 ans, je n’ai rien construit. Ni
couple, ni famille, ni rien de matériel. La chose que je possède et qui a le
plus de valeur, c’est mes skis! ». Au-delà de toute considération
matérialiste liée aux skis, ca m’a fait froid dans le dos.
Je sais que le modèle de vie que
j’ai construit n’est pas celui dont rêve tout le monde et qu’il en existe
autant que de personnalités.
Elle m’a clairement dit qu’aujourd’hui,
cela ne lui manquait pas de ne pas avoir d’enfant et de famille à elle, mais que
demain, si l’envie lui prenait, elle aurait tout à recommencer.
Trouver un type gentil qui l’accompagne
et qui l’accepte comme elle est (au vu de ce qu’elle vient de traverser, le
type à intérêt d’être très très gentil et très très patient…), avoir l’envie de
se lancer dans l’aventure, de construire quelque chose.
Alors non, elle n’est pas
périmée, mais ca l’angoisse.
Je la rassure comme je peux, avec
mes mots, mais j’ai parfois du mal à les trouver tant nos choix de vie sont diamétralement opposés.
Et je l’aime tellement ma copine, que je suis mal qu’elle soit mal.
Après avoir raccroché, je vois
mes Loustics, leur père, et notre vie.
Et là, je me dis que même si tout
n’est pas parfait, si on crie, si la maison n’est pas rangée, si mon travail n’est
pas celui que je souhaite faire encore longtemps, si on a des cernes sous les
yeux, je sais que j’ai fait les bons choix. Et que je n’ai aucun regret.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire